VOUS REPRENDREZ BIEN UN PETIT FOUR ?

Publié le par que-ferons-nous-de-nos-dechets.over-blog.com

Le comité Syndical du SIVADES a adopté, le 21 décembre 2010 une délibération qui prévoit de doter ce syndicat intercommunal d’un double équipement de traitement des déchets ménagers :

  • un Centre de Valorisation Organique à Cannes (en clair un équipement de tri compostage des déchets fermentescibles)
  • et un Centre de Valorisation Energétique à Grasse (en clair un équipement d’incinération des déchets secs qui résulteront du tri effectué au CVO de Cannes).

(voir texte et communiqué de presse du SIVADES)

Quelques remarques  :

Le nouveau plan des déchets avait été approuvé par le Conseil Général la veille de la réunion du SIVADES, certes, mais il n'était pas encore publié, aux yeux de la loi la décision du SIVADES n'est donc pas conforme au plan des déchets en vigueur le 21 Décembre (en l'espèce le plan des déchets de 2004 qui proscrit la construction de nouveaux incinérateurs).


Quand bien même le "nouveau plan" (entaché d'une vision rétrograde qui privilégie l’incinération) serait-il valide, il reste que la décision du SIVADES est fondée sur des tonnages qui ne tiennent pas compte des prévisions de baisse programmées dans ledit plan ; donc, délibération pas conforme quel que soit le plan.

En effet, le PEDMA 2010 programme une baisse des tonnages de collecte de 7% en 2014 et de 9% en 2020 ; on part de 579 kg/hab/an pour la population du SIVADES (96.235 t. / 166.044 habitants) - objectif 2014 : 538,5 kg/hab. - objectif 2020 : 527 kg/hab. ou 87.574 t.

C'est sur la base de ces chiffres que le dossier doit être instruit, ce qui change pas mal de choses :
- le tonnage à incinérer (éventuellement) qui doit aussi être dégraissé,

- et l'obligation de restructurer la collecte, inévitable pour atteindre les objectifs du plan.


Pour ce qui est du coût de traitement avec ce CVE, on peut encore une fois relativiser l'enthousiasme du Président du CG06 et du Préfet des Alpes-Maritimes, tous deux chauds partisans de l’incinération des déchets.

En effet l'exportation des déchets du SIVADES vers la décharge de Septèmes les vallons génère un surcoût annuel de l'ordre de 2.275.000 Euro (estimation SIVADES très officielle) ; le coût d'investissement du "petit four" de Grasse est estimé (pour l'instant) à 60 millions d'Euro, avec une DSP sur 25 ans, ça nous fait : 2,4 Millions d'Euro par an, on y rajoute une estimation de coût de traitement de 150 Euro la tonne (estimation SIVADES), ça nous donne : 150 x 50.000 = 750.000 Euro par an, rien que pour ce qui va passer dans le four, il faut y rajouter le charroi d’échanges entre le CVO de Cannes et le CVE de Grasse estimé à 695.000 Euro par an...

Ces calculs se passent de tout commentaire.

D'autant que le CG06 a promis - juré de réaliser dans le département une Installation de Stockage des Déchets Non Dangereux (ISDND pour simplifier), et que d'ici que le CVE soit construit cette décharge sera en fonction à un coût bien moindre que l'exportation vers Septèmes les vallons.


Encore quelques chiffres :

Les prévisions de collecte du SIVADES : 115.000.000 tonnes par an.

Les refus de valorisation du CVO sont estimés à 10.000 tonnes par an (ces refus ne peuvent aller qu'en ISDND).

Les mâchefers vitrifiés du four : 10% des entrants, soit 5.000 tonnes par an.

Donc 15.000 tonnes à stocker, on ne peut pas se passer d'une ISDND, or le SIVADES gomme cette contrainte.


Si on améliore la collecte en séparant d'emblée les secs et les humides (collecte séparée), on va pouvoir recycler bien des recyclables qui ne peuvent pas l'être dans le cadre d'un collecte en mélange (tout ce qui est souillé par le contact avec les épluchures : papiers, cartons...).

Il faut y ajouter une pesée embarquée de la collecte de secs (et un contrôle de la qualité de la collecte d'humides).

Et enfin instituer une obligation de compostage sur place dans les zones pavillonnaires (pas de collecte de fermentescibles dans ces zones).

Si on installe une recyclerie dans chaque déchetterie, on pourra recycler un tonnage d'apports plus important tout simplement parce qu'ils seront réduits à l'état de matières premières.

On peut arriver ainsi à une mise en ISDND de l'ordre de 20% du tonnage collecté, (Ce qui est le cas de toutes les collectivités qui appliquent ce programme), ça nous donne pour le SIVADES : autour de 23.000 tonnes par an à stocker en ISDND.


Conclusion :

on dépense 60 Millions d'euros amortissables sur 25 ans pour éviter la mise en ISDND de 8.000 tonnes d déchets ultimes par an qui représentent 1.200.000 Euro par an, sur la base de 150 Euro la tonne (nettement plus cher que la plupart des tarifs de stockage d'ultimes), soit 40% coût d'amortissement du CVE.

Le SIVADES a systématiquement refusé de faire cette étude comparative.

Il s'agit donc d'un choix délibéré de filière que les chiffres ne justifient aucunement.

 

Pour conclure, il faut remarquer que le cabinet Merlin, rédacteur de l'étude qui fonde le projet de CVO-CVE, base son étude sur un tonnage collecté de 128.000 tonnes. Or les derniers chiffres connus (rapport d'activité du SIVADES de 2009) sont les suivants :

- Ordures "grises" (les poubelles collectées en porte à porte) : 96.235 tonnes (en baisse de 3.845 tonnes par rapport à 2008).

- Collecte sélective (emballages ménagers collectés en porte à porte) : 12.915 tonnes (dont 10.822 valorisés)

- Encombrants collectés sur voie publique : 6.000 tonnes environ.

Soit 115.000 tonnes environ.

Les apports en déchetterie : 38.834 tonnes, n'ont rien à faire au CVO, l'exception des 11.504 tonnes de déchets verts qui sont apportés dans les déchetteries.

Ni les encombrants, ni le produit de la collecte sélective ne vont au CVO (les encombrants vont dans les déchetteries, la collecte sélective au centre de tri.

De sorte que, même si l'on rajoute les 11.504 tonnes de déchets verts qui arrivent dans les déchetteries au tonnage d'ordures grises, on est obligé de constater que le CVO devra se contenter de traiter un tonnage de : 96.235 + 11.504 = 107.739 tonnes.

On peut en déduire que le cabinet Merlin a joué à "Monsieur plus" pour un peu plus de 20.000 tonnes, ce qui n’arrange pas la crédibilité de la décision...

Jean-Raymond VINCIGUERRA.
Conseiller Municipal de Grasse
Conseiller Général des Alpes-Maritimes

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A
<br /> Pour le code de l'environnement est ultime "un déchet, résultant ou non du traitement d’un déchet,<br /> qui n’est plus susceptible d’être traité dans les conditions techniques et économiques du moment,<br /> notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de son caractère polluant ou dangereux"<br /> C'est donc ce qu'on ne sait plus traiter ou réduire : en général, il aboutit en décharge .. à suivre<br /> <br /> <br />
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E
<br /> Il apparait pourtant que les pays européens qui trient et recyclent le plus, sont partisans de l'incinération (Suède, P-B, Allemagne, etc).<br /> Il semble donc que l'idée de tri maximum peut être associée à l'incinération des déchets ultimes non?<br /> <br /> <br />
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J
<br /> La question posée était : en quoi la construction d'un CVE gène une politique de recyclage maximum ?<br /> Un four d'incinération (un CVE fonctionne avec au départ du traitement un four d'incinération, rappelons cette évidence)fonctionne avec un tonnage déterminé. Ce tonnage doit tout au long de la vie<br /> du four être mis à disposition du four ; le tonnage prévu pour le four du SIVADES (50.000 tonnes) correspond aux refus de tri incinérables du CVE ; si, à un quelconque moment dans les 25 ans qui<br /> viennent, il devient possible de recycler ces refus de tri (évolution des techniques de tri, recycleur plus proche, collecte organisée différemment)... Il faudra toujours apporter au four 50.000<br /> tonnes à brûler, il ne sera pas possible de recycler ce qui, à ce moment là, pourrait l'être. Donc il est parfaitement logique d'affirmer qu'un four d'incinération est un obstacle au recyclage et<br /> qu'une politique de recyclage des déchets ne peut pas s'accommoder d'un four d'incinération..<br /> <br /> <br />
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E
<br /> je pose la même question de Jean du Terroir. En quoi votre proposition de tri "maximum" est-elle antinomique avec la création de centres de valorisation organique et énergétique?<br /> Merci<br /> Etienne<br /> <br /> <br />
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Q
<br /> <br /> Ce qui est en cause, c'est l'incinération, qu'elle soit ou non baptisée valorisation.<br /> <br /> <br /> Elle est destructrice de ressources réutilisables, et productrice de produits très toxiques que l'on ne sait pas traiter ou utiliser.<br /> <br /> <br /> La question est donc comment pouvons-nous valoriser au maximum nos déchets avec le moins de nuisances possibles pour l'environnement, c'est à dire la nature et les gens ...<br /> <br /> <br /> <br />
J
<br /> En quoi le Centre de Valorisation Organique de Cannes et le Centre de Valorisation énergétique de Grasse s'opposeraient-ils à vos propositions de séparation entre "secs" et "humides" dans la<br /> collecte et/ou d'obligation de compostage sur place dans les zones pavillonnaires?<br /> <br /> La gestion de l'environnement implique une profonde collaboration entre collectivités publiques, privées et citoyens..<br /> <br /> <br />
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A
<br /> <br /> Dans un domaine aussi important, la collaboration doit d'abord être les citoyens et leurs collectivités territoriales et l'Etat. Certes les entreprises privées ont des compétences et des moyens,<br /> mais elles ont par nature d'autres objectifs. Il convient donc que les orientations fondamentales et les choix importants restent aux mains du public (au sens large: citoyens, collectivités, etc)<br /> qui seul peut garantir la recherche de l'optimum pour tous !<br /> <br /> <br /> <br />